[Après l’arrêt du fact-checking, Mark Zuckerberg a annoncé la fin des programmes pour la diversité à Meta]
Je n’arrive pas à comprendre le sens des jérémiades émises par l’opinion qui se veut éclairée sur les victoires de Elon Musk face à Thierry Breton ou ses anciens concurrents des GAFAM californiennes.
Y a-t-il vraiment encore des gens suffisamment naïfs ou ignorants des réalités élémentaires de l’époque contemporaine pour croire que des médias assermentés comme Le Monde, le Gardian, le Wall Street Journal, BFM-TV, la BBC, France Inter ou CBS puissent avoir plus d’influence sur les idées ou les sensibilités collectives de la majorité des sujets des nations occidentales que ce que se racontent les gens, à longueur de journées, de Sacramento à Budapest ou de Montréal à Zagreb, sur les réseaux sociaux ou au comptoir des bistrots ?
Il serait temps pour les membres auto-désignés du bloc élitaire de comprendre une chose : si nous sommes si nombreux et parfois si vindicativement prolixes sur Facebook ou sur X, c’est précisément parce que ces plateformes sont privées, plus ou moins indépendantes des interdits générés par le droit normatif par lequel s’édifiait la légitimité des autorités règlementaires, et que ce qu’on y écrit, souvent sous le couvert de l’anonymat, n’est pas susceptible d’être publié ou proféré ailleurs.
On a souvent comparé la révolution numérique à celle de la Réforme protestante, lorsque le double usage du libre-examen théologique et des langues nationales vernaculaires a remis en cause l’autorité dogmatique des papes et des princes de l’Eglise latine.
Mais je crois que c’est bien plus profond que ça : la Toile et les réseaux sociaux ont créé la possibilité d’une prolifération planétaire des opinions et des sensibilités qui ne cherche pas à se confronter aux lois de la science ou aux démonstrations des clercs. Elle les nargue, ou mieux les ignore.
Si Luther avait été un Internaute, il aurait peut-être publié ses 95 thèses sur Facebook, mais il n’aurait pas cherché à provoquer frontalement Charles Quint ou la papauté : il serait passé outre la convocation à la Diète de Worms, rendant cette dernière totalement inutile.
Internet répercute au-delà des peuples et des normes aléatoires du droit le principe même qui est au fondement des régimes démocratiques : la loi du nombre comme extension de la puissance collective et le principe de la liberté d’opinion ou de réunion comme garant de la pérennité du monde social.
Ceux qui croient encore possible d’édifier une vérité commune à partir des créations du droit positif et l’autorité de la presse libérale sont plus dérisoirement archaïques et ridicules que les juges dominicains de Galilée et de Giordano Bruno.
Le paradigme post-kantien n’a pas survécu à la bipolarité de la guerre froide, et qu’on s’en félicite ou non, personne ne pourra en restaurer l’évidence.
Surtout pas les technocrates de Bruxelles, les avocats des ligues de vertu progressistes ou communautaires, ou encore les éditorialistes des chaînes des télévisions d’Etat.
En attendant, remercions Mark Zuckerberg, d’avoir si tardivement mais complaisamment capitulé face à Elon Musk.
Feux d’artifices, masques et bergamasques, vérités et mensonges n’ont pas fini d’éclore sur la Toile comme les arbres et les plantes dans la savane.
La caverne désormais concurrence les feux atténués du soleil, mais, bougre de merdre, ce n’est pas pour cela que nous allons entrer à jamais dans la nuit.
2 commentaires
Le Tweet de la caverne par Platon a été retiré récemment
Nazifier Musk c’est d’un « confort-misme » à gauche. Make Zuckerberg great again !