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L’EHPAD mental de l’intelligentsia libérale

par Gabriel Nerciat 7 mai 2025
par Gabriel Nerciat 7 mai 2025
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Je commence à en avoir un peu marre de la nouvelle scie chère à la bourgeoisie libérale éclairée sur les deux rives de l’Atlantique, qu’on peut résumer ainsi : trumpisme et wokisme sont la même chose, ou (ce qui revient au même) le trumpisme ne serait rien d’autre qu’un wokisme inversé.

C’est Stephen Pinker, ce producteur en série de poncifs centre-gauche, qui a lancé le gimmick depuis sa chaire du Massachussets après l’élection de Trump, aussitôt repris en France par toute une palanquée de plumitifs et d’universitaires sociaux-démocrates ou macroniens (Rosanvallon, BHL, Joffrin, Bruckner, Daoud, Badinter, etc.).

La grande mode, dès lors, est devenue la polémique de salon entre les progressistes qui dénient l’existence même du wokisme et les libéraux de gauche (ou de droite, d’ailleurs, comme le pauvre Finkie) qui expliquent que le wokisme existe bien mais ne diffère pas par essence du trumpisme (autre façon de dire qu’ils détestent Trump, tout en condamnant sans trop de risques les dérives de l’islamo-gauchisme décolonial).

Pour moi, cela indique surtout l’identité de la maladie dont souffre l’intelligentsia occidentale depuis déjà quelque temps : moins le fanatisme idéologique, comme aux deux ou trois siècles derniers, ou le conformisme rad-soc longtemps illustré par les vieux notables SFIO, que l’entrée définitive dans l’ère sénile de l’hiver des idées.

Car prétendre que le wokisme n’existe pas, ou admettre seulement la nocivité de sa présence pour le renvoyer dos-à-dos avec le conservatisme populiste illibéral d’un Trump ou d’un Vance, c’est soit se foutre de la gueule du monde, soit être devenu physiologiquement incapable d’observer ce que le réel est devenu.

En réalité, c’est plutôt une bonne nouvelle : pas la peine de s’en prendre à Pinker ou à ses émules, moins encore de les abreuver de noms d’oiseaux.

Ils ont eux-mêmes élaboré la maison de retraite mentale d’où ils ne sortiront plus.

Car mal nommer et mal identifier ses ennemis n’est pas seulement choisir la mauvaise cause ; c’est, catastrophiquement, fuir un champ de bataille historique que vous n’êtes plus en mesure d’influencer dans un sens ou dans l’autre.

C’est une fin bien pire, à mon sens, que celle du vieux Sartre aveugle en rupture de maoïsme ou le déclin morose de Jean-Jacques qui herborise en solitaire près du château d’Ermenonville.

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  • Un pacte de non-agression
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3 commentaires

Joël M 3 mai 2025 - 18h26

Jouissif !

Répondre
Alain 4 mai 2025 - 9h24

La BD « Faut pas prendre les cons pour des gens » résume assez bien l’air du temps…

Répondre
Avenel 24 juin 2025 - 16h05

Mouais. Le titre est marrant, mais c’est un article pour lecteurs juvéniles qui n’ont rien connu. Car le wokisme n’est que le nouveau nom de la contre-culture californienne des années 1960 qui s’est vomie en France à la faveur de Mai 68. Nil novi. Ce qui frappe, dans Mai 68, c’est la totale absence d’idées, justement. Absence d’idées assez précisément décrite par Jacques Laurent dans son Histoire égoïste. Personne donc n’a été frappé de sénilité. Mai 68, avec sa cohorte de BHL, de Geismar, de Goldman, de Cohn-Bendit, de Julien Dray, de Kouchner, c’est l’ouverture de l’ère du vide absolu. Avec Mitterrand qui a porté tout ce monde-là au pouvoir, nous avons vu s’installer la dictature du vide et la guerre contre toute forme d’expression des idées. La concentration éditoriale favorisée par le pouvoir mitterrandien a achevé de fermer toute tribune aux vrais penseurs, vrais écrivains, vrais génies créateurs, vrais reporters. Je n’observe donc AUCUNE DECADENCE. La gauche caviar des bobos soixante-huitards et du milieu mitterrandien en général n’a JAMAIS produit un seul concept digne d’être évoqué. Idem du milieu contre-culturel américain dont elle n’est qu’une misérable copie. Enfin, depuis 60 années interminables, j’observe que la gauche caviar s’est fabriqué un monde parallèle où tout est irréel, et que ça ne l’empêche pas de vivre, de prospérer même, et surtout: de donner des leçons! Et cette caste se renouvelle sans embûche puisqu’aujourd’hui leurs enfants prennent la relève et nous dictent, sur fonds publics, quoi penser de travers au motif des goude niouze vs fèque niouze.

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