Depuis le scandale Bedford, établissement sous tutelle islamiste qui a défrayé la chronique en octobre dernier, l’islamisation est devenue, en quelques semaines, un sujet national pour les québécois. Si le gouvernement Legault ne semble avoir aucune difficulté à parler d’entrisme islamique en milieu scolaire, il ferme encore les yeux sur la source du problème : l’immigration, qui n’est, quant à elle, jamais mentionnée. Pire : selon la nouvelle feuille de route du gouvernement québécois, le Québec devrait accueillir jusqu’à 66 500 immigrants en 2025, un seuil supérieur aux années précédentes.
Le tabou de l’immigration
« Toutes les sociétés aujourd’hui [courent] le risque qu’il y ait des concepts religieux islamistes dans nos écoles », a déclaré le premier ministre québécois François Legault à l’Assemblée nationale le 29 octobre dernier. Le cas Bedford a permis de mettre en lumière la question de l’entrisme islamique dans les institutions québécoises, poussant le gouvernement à étendre ses investigations sur plusieurs autres établissement et à prendre des mesures jusqu’alors inédites au pays de de la fleur de lys. Le 22 octobre, Bernard Drainville, ministre de l’Éducation, a suspendu les onze enseignants mis en cause avec effet immédiat.
Depuis quelques semaines, la parole sur la montée en puissance de l’intégrisme se libère au sein de l’espace public : « Je le vois tout le temps. Je le vois dans les milieux de travail, je le vois même à la piscine municipale, je le vois à la bibliothèque, je le vois pendant les activités, je le vois pendant l’Halloween où j’ai des personnes qui refusent d’adhérer au thème, par exemple, pour les enfants. Je le vois partout pendant toute l’année et partout, dans toutes les places » Fatima Aboubakr, directrice d’une garderie.
Si le gouvernement du Québec semble agir avec fermeté sur les conséquences de l’entrisme islamique au sein de ses établissements scolaires, son approche demeure pour le moins confuse. En effet, son action ne se limite qu’aux conséquences du phénomène, quitte à s’empêtrer dans un vocabulaire et des réflexes empruntés à la politique française, invoquant la laïcité comme rempart suprême, jusqu’à oublier l’Islam, lui préférant le terme d’islamisme. Plus grave, le lien avec l’immigration, pourtant source du problème, n’est jamais assumé parmi la classe politique québécoise.
Paul St Pierre Plamondon, chef du Parti Québécois, préfère diluer le problème en évoquant « un réel enjeu d’envahissement religieux dans l’espace public » sans mentionner la religion ‘’envahissante’’. Pour les partis d’opposition, pas question non plus de parler d’Islam. Avec une remise en question du financement de toutes les écoles privées religieuses, les responsables politiques s’arrangent pour confondre toutes les religions dans le prosélytisme d’une seule. Jusqu’au premier ministre, qui a indiqué être disposé à « débattre […] de bonne foi » de l’abolition du financement public des écoles privées religieuses.
Pourtant, comme en témoigne une étude de l’ONG Angus Reid Institute publiée en 2023, le sentiment d’invasion est bien le fait d’une religion en particulier. 52 % des Québécois auraient une opinion défavorable de l’Islam, une proportion deux fois plus importante que dans le reste du Canada. Selon le recensement de 2021, il y aurait près de 1 800 000 musulmans au Canada, dont 365 000 à Montréal. Au Québec, la population musulmane est passée de : 1,5% en 2001 à 5,1% en 2021. Une proportion appelée à augmenter, si l’on se réfère à la nouvelle feuille de route du gouvernement québécois, qui a hissé le seuil à 66 500 immigrants pour 2025.
Face à l’islamisation et coincé entre le marteau du modèle français et l’enclume du multiculturalisme canadien, le Québec peine à nommer le problème et s’enlise dans une situation doublement perdante. En effet, la laïcité est un bouclier bien trop fragile pour s’imposer aux masses musulmanes et supporter les coups de boutoir d’un gouvernement fédéral qui a nommé une femme voilée ‘’représentante de la lutte contre l’islamophobie’’ avec un budget de 5,6 millions de dollars.
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